L’écologie dans la pub : spots verts et « greenwashing »

L'imagerie écolo

L’écologie occupe aujourd’hui une place importante dans la publicité, qu’il s’agisse de vraie sensibilisation environnementale ou de pur opportunisme communicationnel. Petit tour d’horizon des différents types de pubs «vertes».

Un paysage bucolique et coloré, quelques bruits de la nature sur fond de musique douce et apaisante… les ingrédients de la « pub verte » sont connus. À la télé, sur des affiches ou à la radio, difficile d’y échapper. Rien de surprenant, la problématique écologique est dans l’air du temps. Mais dans cette avalanche de messages éco-responsables, il faut pouvoir démêler les bons sentiments des opérations de « greenwashing » (ou « écoblanchiment »), cette pratique des entreprises qui consiste à surfer sur la vague écologique pour vendre leurs produits.

Des firmes pas foncièrement écolos se permettent des énormités pour « verdir » leur image. L’OIP (Observatoire Indépendant de la Publicité) veille à ce que ces impostures soient dénoncées. Cette organisation regroupe des associations écologistes et met à contribution les internautes pour pointer du doigt les mensonges publicitaires en matière d’environnement. Et la matière ne manque pas! Début février, l’OIP a publié un « Flop 10 » des pubs pseudo-écolos, classement relayé par un article de l’Express. Total, la marque de lessive « Le Chat » et Renault se partagent le podium.

Les constructeurs automobiles ne sont pas les derniers à faire du «greenwashing». Sur son site, Greenpeace propose une manière originale de protester contre ce matraquage : l’internaute peut créer sa propre publicité mensongère et l’envoyer aux constructeurs ! Il peut aussi voter pour la pub la plus mensongère, entre Toyota, Saab, Citroën, Volvo et Volkswagen. Il s’agit de spots de pub télévisés, mais le « greenwashing » est également amplement développé sur les affiches, dont on peut trouver de nombreuses analyses sur le net, comme sur le site de l’Alliance pour la planète.

Un exemple de "greenwashing"

Le « greenwashing » ne se limite pas à vanter les mérites écologiques d’un produit qui n’en a pas. Il consiste surtout à jouer sur l’inconscient du consommateur par l’intermédiaire d’images liées à la nature, de slogans flous ou d’omissions. L’experte en « street marketing » Geneviève Piquette explique dans un article publié sur le site marketing-étudiant que les entreprises sont guidées par la loi du marché : « les grandes marques de ce monde n’ont d’autre choix que de prendre le tournant environnemental dans le but de se forger un capital de sympathie auprès des éco-consommateurs dont le nombre ne cesse d’augmenter. »

Où sont les vraies pubs écolos ?


Dire que le «greenwashing» représente une grande majorité des publicités en matière d’écologie n’est pas tomber dans un excès de pessimisme. Il y a certes les messages de sensibilisation provenant d’associations, du Ministère de l’Environnement ou d’ONG comme Greenpeace. Mais dès qu’il s’agit de vendre un produit, les prétentions écolos sont tout de suite l’objet de suspicions. Si l’OIP a une catégorie «Flop» bien remplie, il propose aussi une catégorie «Top» (visant à récompenser les publicités éco-responsables), qui se trouve pour l’heure… vide! Ce reproche a déjà été formulé à l’encontre des écologistes, que l’on accuse d’être plus aptes à dénoncer qu’à apporter des solutions.

La vidéo ci-dessous répertorie une quinzaine de publicités dans les catégories suivantes :
– publicités véhiculant un message écologique
– publicités vantant un produit aux vertus écolos,
– publicités pseudo-écolos
– publicités profitant du second degré pour associer leur image à l’écologie.


(Montage vidéo réalisé par Jérôme Brisson)

Publicités véhiculant un message écologique
Messages de sensibilisation plus ou moins alarmistes ou humoristiques, les publicités purement écolos ont souvent un thème commun : la vengeance de la nature sur l’homme. En réalité, l’homme est condamné à l’auto-discipline, mais peut-être qu’une bonne rouste de temps en temps le rendrait plus responsable. C’est en tout cas le fantasme que l’on retrouve dans plusieurs de ces extraits.

Publicités vantant un produit aux vertus écolos
Voilà une catégorie bien délicate ! Si la publicité pour Bonobox n’est pas vraiment source de contestation, celles d’Apple et d’Audi, pour un Macbook écolo et une voiture «Start and Stop», pourraient très bien être considérées comme du «greenwashing» tant ces deux entreprises ont encore des progrès à faire en matière d’écologie. Il faut prendre ses précautions quand il s’agit d’évaluer la «valeur» écologique d’un produit à l’échelle d’une entreprise.

Publicités pseudo-écolos
Du « greenwashing » en bonne et due forme ! Ces publicités établissent un lien douteux avec l’écologie, souvent par la force de l’image, pour des produits qui ne le sont pas, ou pour se valoriser. Certaines pubs sont par ailleurs très bien faites (Total, Smirnoff…). Mais lorsqu’on découvre le nom de l’annonceur en fin de spot, on ne peut s’empêcher de sourire. Dans le même genre, la chaîne de restauration Quick n’a pas fait dans la nuance dans sa publicité pour « l’institut Quick » destinée au grand écran (cliquer sur « voir le film »).

Le second degré écolo
Une nouvelle forme de publicités basées sur l’écologie est-elle en train naître? Le message écolo est tellement présent qu’il commence à être parodié. Plutôt que d’utiliser les mêmes recettes que le matraquage écolo de masse, certains annonceurs n’hésitent pas à employer le second degré pour surfer sur la vague du « greenwashing » tout en se donnant l’air de ne pas y toucher. Volkswagen et son village « Atmos » tourne en dérision l’extrémisme écologique, tout en attribuant des vertus écologiques à son modèle Passat.

Encore plus édifiant, BN affirme sur un ton humoristique que ses biscuits vont aider à faire baisser l’effet de serre. Ce spot s’intègre dans une série de publicités assurant qu’en mangeant des BN, on peut sauver le régime des retraites ou boucher le trou de la Sécu. Il n’empêche que dans son spot volontairement «pseudo-écolo», BN, qui s’adresse aussi à des enfants, joue sur l’ambiguïté pour se donner une image « verte ».

L’OIP a dénoncé les raccourcis de la pub BN (qui fait d’ailleurs partie du «Flop 10»), sans même prendre en compte la notion de second degré. Ce type d’analyse expose les écologistes à des reproches de rigidité voire de mauvaise foi. Y a-t-il trop de suspicion face aux pubs écolos provenant d’entreprises qui, après tout, font peut-être de réels efforts pour s’adapter ? Les écologistes voient-ils le mal partout ? Leur réaction est sûrement légitime face à la manipulation constante dont la thématique écologique est l’outil.

Jérôme Brisson

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